La température

A un kilomètre du camp de base il y a un petit champ de glace bleue, mais aussi des rochers (de la moraine) et bien entendu de la neige.

J’ai fait l’expérience de placer dans cette zone trois thermomètres électroniques, accrochés chacun à un bambou à 15 cm du sol.

Je les ai réparti de la façon suivante : un thermomètre sur la glace bleue, un autre près d’un rocher et le troisième au dessus de la neige. Les deux derniers étaient séparés de 5 m et le troisième était à environ une distance de 30 m. Ils étaient donc très proches les uns des autres et en tout cas dans le même environnement météorologique. A première vue les mesures des thermomètres auraient du être semblables.

Voilà quelques résultats :

24/12/2000 18h00

Thermomètre

Température

(°C)

Rocher

-9,2

Neige

-10,2

Glace bleue

-9,7

 

24/12/2000 19h30

Thermomètre

Température

(°C)

Rocher

-9

Neige

-10

Glace bleue

-6,6

 

25/12/2000 01h00

Thermomètre

Température

(°C)

Rocher

-26,4

Neige

-29,9

Glace bleue

-22,2

 

 

25/12/2000 04h30

Thermomètre

Température

(°C)

Rocher

-17,6

Neige

-18,7

Glace bleue

-17,2

 

Malgré ce que l’on aurait pu imaginer, on obtient des mesures très différentes sur les trois thermomètres, alors qu’ils ne sont espacés que de quelques mètres : jusqu’à plus de 7 °C de différence à 1h du matin entre les mesures glace bleue et neige, distantes de 30 mètres, mais aussi à la même heure 3,5 °C de différence entre le rocher et la neige qui sont seulement à 5 m l’un de l’autre.

Aux autres heures les différences sont moins grandes mais existent toujours. La température au dessus du rocher est toujours plus élevée que celle au dessus de la neige, et en général celle au dessus de la glace bleue est plus haute que les deux autres. Comment expliquer cela ?

La roche, à cause de sa couleur (voir l’expérience " climat polaire et rayonnement solaire ") a un albédo plus faible que la neige, cela veut dire qu’elle réfléchit nettement moins les rayons du soleil et donc qu’elle absorbe plus de chaleur (environ 25 % des rayons sont réfléchis par le rocher alors que c’est plus de 80 % par la neige). Cette chaleur se transmet alors à l’air qui est au dessus du rocher, en particulier la " nuit " lorsque la différence de température est plus importante. La température au dessus de la roche est donc toujours plus élevée que celle au dessus de la neige.

Comme le rocher, la glace bleue réfléchit moins les rayons solaires que la neige (56 % environ), absorbe plus d’énergie et chauffe l’air situé au dessus. Mais de plus, à la surface de la glace bleue se passe continuellement le phénomène de sublimation où la glace se transforme en vapeur d’eau. Ce changement d’état s’accompagne d’échanges d’énergie au niveau de la surface, qui ont aussi un effet sur la température de l’air.

L’air au dessus de la glace bleue est par conséquent toujours plus chaud que celui au dessus de la neige. La glace bleue, bien que minoritaire par rapport à la neige, a donc une importance climatique en Antarctique.