Reportage du 10 janvier 2001

Recherche de bactéries pour l'Université de Bruxelles

L'intérieur du continent antarctique où nous sommes est un immense désert de glace et de montagnes où apparemment il n’y a pas de vie. En apparence seulement, car des organismes vivants ont réussi à s'adapter aux conditions extrêmes : les lichens et les bactéries.

L'Antarctique : un immense désert de glace

Photo reproduite avec l'accord du

Britsh Antarctic Survey

Les bactéries sont des êtres unicellulaires microscopiques dont l’importance est très grande pour l’équilibre du monde vivant. Elles sont invisibles à l'œil, car trop petites, mais on peut les trouver dans tous les milieux: air, eau, sol, glace, sur les mains, sur les cheveux, sur les meubles, dans le lait …

Certaines sont "favorables" : elles permettent la fabrication des yaourts, elles contribuent à la digestion dans notre estomac ou elles décomposent tous les végétaux et organismes morts, et certains de nos déchets ménagers. D'autres sont "agressives", on dit qu'elles sont pathogènes pour l'homme, comme les microbes qui déclenchent des maladies et les bactéries qui dégradent les produits alimentaires les rendant propices aux intoxications alimentaires.

Récolte d'une matière jaunâtre afin de découvrir des bactéries antarctiques

Pour les observer il faut un microscope, mais même avec cet instrument cela reste parfois difficile. Or, les bactéries se reproduisent facilement en se divisant en deux cellules identiques (scissiparité), le meilleur moyen pour les mettre en évidence est donc de les placer dans des conditions favorables (un milieu nutritif riche et une température adéquate) pour qu'elles se multiplient et soient visibles à l'œil.

Nous vous proposons de faire l’expérience de découvrir les bactéries dans votre environnement en suivant les instructions de l’expérience "mission bactéries".

Il existe également des bactéries dans les milieux extrêmes, comme celles découvertes par des chercheurs à 2300 m de profondeur dans l'océan Atlantique, vivant près de cheminées hydrothermales d'où s'échappe de l'eau brûlante.

D'autres vivent dans le grand froid comme en Antarctique. On les appelle psychrophiles, elles se sont adaptées au froid et peuvent se multiplier entre des températures de -12°C et +20°C. On les trouve dans le sol, dans la glace et dans l'eau.

 

Lors de l’expédition j’ai la mission de collecter des milieux (neige, sol) où des bactéries pourraient exister, à cela plusieurs raisons :

  1. Seulement une toute petite portion des bactéries sont connues et principalement des bactéries vivant à des températures moyennes ou très élevées. Trouver en Antarctique de nouvelles espèces ferait progresser les connaissances scientifiques.

  2. Les bactéries, ou des êtres unicellulaires proches, sont certainement les premiers êtres vivants apparus sur Terre. Les scientifiques actuellement essaient de savoir si c’étaient plutôt des bactéries de milieux chauds ou froids, mais pour répondre à cette question il faut d’abord mieux connaître celles des mondes polaires.

  3. L’Antarctique est la région sur Terre où les conditions sont les plus proches de celles de la planète Mars. C’est donc l’endroit le plus intéressant pour commencer l’étude de l’existence éventuelle d’une vie bactérienne sur Mars.

  4. Comprendre comment des bactéries sont actives en Antarctique malgré des températures basses peut mener à concevoir de nouveaux produits, comme des lessives ne nécessitant pas d’eau chaude, ce qui serait une révolution en particulier pour les pays en voie de développement.

L’Antarctique, si on arrive à ne pas le polluer, à le garder dans son état original, peut être pour la planète entière une source de progrès et pas seulement grâce à la recherche sur les bactéries. La conservation et le respect de ce continent, aujourd’hui et dans l’avenir, doit donc être pour nous tous une constante préoccupation.

Lorsque je suis sur le terrain et que je veux prélever des échantillons, je le fais à l'aide d'une spatule que j’ai préalablement brûlée avec un briquet afin d’éliminer toutes bactéries que je pourrais avoir moi même apportées. J’introduis ensuite rapidement les échantillons dans des petits flacons stériles. Ils seront conservés à une température inférieure à 0°C et seront ramenés à Bruxelles pour être confiés au chercheur Nicolas Glansdorff, qui pourra alors nous dire si nous avons ramené des bactéries de l'Antarctique et nous les montrer.

Ainsi, pour le moment j’ai pris des échantillons de neige autour de la station Blue One, dans des zones ou il y avait des traces de carburant d’avion, mais aussi des particules ressemblant à du sable.

 

Avec Ronald, sur le col proche de notre camp de base, j’ai prélevé des lichens qui peuvent peut-être accueillir des bactéries, j’ai pris aussi de la matière blanche et jaune inconnue que l’on trouve régulièrement sur les roches.

Sur cette même arête le sol rocailleux pouvait être intéressant, j’en ai donc emporté, ainsi qu’une terre de couleur verte que j’ai découverte plus tard avec Daniel.

Terre de couleur verte